Droit pénal du travail et discrimination : Cour de cassation, Chambre criminelle, n°20-80.056


– Droit pénal du travail

QUESTION : A quel moment le dirigeant d’entreprise commet-il un acte de discrimination?

REPONSE : Au moment de la décision de discriminer et non au moment de la matérialisation de l’acte de discrimination.

EXPLICATION : Saisie d’une problématique relative à la discrimination, la Cour de cassation a rejeté le pourvoi formé par des parties civiles, après que la Cour d’appel a relaxé le prévenu poursuivi pour avoir établi, par une note de service, des critères d’avancement incluant notamment le lieu de résidence.

Pour la Cour d’appel, des éléments de nature discriminatoire résultaient bien de l’arrêté du 4 mai 2016 portant tableau d’avancement au grade d’adjudant de sapeur-pompier professionnel au titre de l’année 2015. Mais ces critères ne suffisaient pas à caractériser le délit pénal, qui exige de démontrer une intention ainsi qu’un pouvoir décisionnaire.

Selon les dispositions de l’article 225-2 du Code pénal, seules sont punissables les discriminations fondées sur l’un des critères limitativement énumérés aux articles 225-1 à 225-1-2, lesquels doivent en outre être directes. Aussi, une décision qui conduirait à favoriser les personnes originaires d’une localité, car présentant de meilleure chance d’assurer un service pendant une durée importante, ne saurait revêtir le caractère d’une discrimination directe.

Pour ces raisons, la Cour de cassation a rejeté le pourvoi formé contre l’arrêt de la Cour d’appel.

Toutefois, au-delà de cette décision, cet arrêt énonce un principe intéressant qui fixe le moment à partir duquel le délit de discrimination est caractérisé. Ainsi :

– d’une part, il ne résulte pas de l’article 225-1 du Code pénal que le fait pour quiconque d’opérer une distinction se traduisant par une discrimination prohibée implique qu’il la mette directement en œuvre,

– d’autre part, il suffit que ladite distinction ait été proposée par une personne participant, de par ses fonctions, au pouvoir de direction de la personne morale qui met en œuvre la mesure discriminatoire, ou de l’un de ses organes, pour que cette personne physique soit susceptible de faire l’objet de poursuites à raison de ces textes.

En somme, la commission de l’infraction est établie dès lors que la proposition a été émise de prendre des décisions sur une base discriminatoire, au sens des dispositions de l’article 225-1 et suivant les critères limitativement énumérés aux articles 225-1 à 225-1-2 du Code pénal.

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